Hommage à Serge Kornmann

Toutes les brèves :  Le monde de l'animation

Serge Kornmann « Le Chrononaute »

6/03/1937 – 7/12/2018

Serge Kornmann était l'une des encyclopédies vivantes du cinéma d'animation du 20ème siècle, et le témoin enthousiaste de la part française. 

Parallèlement à sa carrière de professeur d’Anglais à l’Académie de Strasbourg et sa passion pour les langues, il était empreint d’une passion inextinguible pour le cinéma d'animation qu'il alimentait depuis son enfance et plus particulièrement depuis les années cinquante. Passion qui se dégageait de lui et qui ne laissait pas indifférentes les personnes qui ont eu la chance de le côtoyer.

Non seulement il donnait l'impression d'avoir tout vu de près, avoir assisté à tous les tournages, rencontré tous les grands noms, découvert tous les secrets de fabrication, mais sa mémoire d'éléphant entretenait le moindre détail de son parcours de passionné.

Si l’on prenait la peine d’engager la conversation avec lui on découvrait tout d’abord une personne affable, généreuse, enthousiaste et pleine d’humour. Mais aussi quelqu’un de rigoureux dans son travail, soucieux de transmettre son savoir. Il était une source inépuisable d’informations sur l’histoire de l’animation et plus encore si l’on lui donnait le temps d’aller consulter ses fameuses fiches, car comme il aimait le dire « on est jamais trop prudent »

Quand on souhaitait lui téléphoner, on savait qu'il fallait avoir au moins une heure devant nous car chaque nom de réalisateur et chaque titre de film déclenchait toute une série d'histoires qu'il adorait raconter.

Secrétaire du jury du festival national du film d’animation de Marly-le-Roy et d’Auch il présenta aussi pendant 4 ans des chroniques - souvent mémorables - dans l’émission de radio Bulles de Rêves, consacrée à l’animation, où il y partageait ses anecdotes souvent vécues, passionnantes et incroyables, toujours avec son style si personnel.

Au crépuscule du 20ème siècle, les grands noms du dessin animé sur celluloïd ou de l'âge d'or de l'animation de marionnettes s'éteignant les uns après les autres, le "Chrononaute" honorait sous sa plume leur mémoire dans la Lettre de l'Afca dont il fut membre et aussi secrétaire général dans les années quatre-vingt-dix.

Son dévouement pour la cause du cinéma d’animation fut énorme d’un point de vue documentaire.

Il contribua également à plusieurs ouvrages, articles et traductions dont :

« Cinéma d’animation : Ralph Bakshi », étude publiée dans le cadre de la programmation « L’esprit Bakshi », bibliothèque du centre Pompidou (Avril-mai 2007)

Deux traductions de l’américain (éditions Dreamland, Thierry Steff) Solomon Charles « Les inconnus de Walt Disney » (The Disney that never was, éditions Walt Disney Company inc 1995). 221 pages, 4ème trimestre 1996.

Il fut également l’auteur de cinq biographies dans l’ouvrage de référence « Du praxinoscope au cellulo, un demi-siècle de cinéma d’animation en France (1892-1948), édité par le CNC en septembre 2007 (Erik, Faizant, Peynet, Marcel Floris, René Risacher)

En 2018, avec la complicité de sa compagne Catherine Kornmann, il a souhaité donner son énorme collection personnelle de livres, films, images, articles et documents divers au CNC et aux Musées d’Annecy - institutions qui œuvrent en faveur du patrimoine -  afin qu’elle soit accessible à tous.

Ce fonds est remarquable et reflète l’exigence qu’il avait dans son travail, car au-delà des ouvrages, ses recherches et analyses sont d’une grande richesse historique, d’autant plus qu’il en a été souvent le témoin.

Il avait décidé de se cantonner à cet artisanat de l'image par image qu'il admirait tant, car l'animation numérique du 21ème siècle ne le charmait pas du tout autant. Son énorme collection personnelle de livres, films, images, articles et documents divers, constitue aujourd’hui un fonds inestimable.

Ce dernier geste témoigne encore de sa volonté de transmettre et de partager sa passion, ce qu’il a fait toute sa vie.

Jean-Baptiste Garnero

Merci à Mikhal Bak, Olivier Catherin, Denis Walgenwitz et Lionel Charpy pour leurs témoignages qui ont alimenté ce texte.